Le CàMFoiDS > Guapo – Black Oni

Guapo - Black OniDe la définition du bruit.

Où commence la musique, où s’arrête le bruit ? Voici une question bien compliquée. Je vous ai déjà raconté que je ne considère pas le fait de taper sur des tambours comme de la musique. Le cd que j’ai trouvé ici va me permettre de relancer le débat avec moi-même.

Pour commencer, prenons le en main. Il est noir. Presque intégralement noir. Aucun nom marqué ni devant ni derrière. Pas de groupe, pas d’album. Ce n’est que sur la tranche qu’apparaissent ces informations : Guapo – Black Oni. Qu’attendre de cet OVNI noir ?

Une forêt ! On distingue une forêt sur la couverture ! Serait-ce du metal ? Du Black Metal ? Rhaaa, aucun indice complémentaire ne permet de nous orienter !

Allez, on va ouvrir le livret de l’album. On le déplie devant nous (car c’est une longue feuille pliée, pas un vrai livret). Sur la première face, il n’y a rien, que du noir. Enfin, si, en y regardant de plus près, il y a quelque chose : des photos de forêt, d’arbres, de galets, mais toutes tellement sombres qu’on les distingue à peine. De l’autre côté, tout est d’un rouge uni. Sur chaque volet du dépliant, une petite information. Le titre sur le premier volet, la liste des chansons sur le second, les crédits sur le troisième, les remerciements sur le suivant, etc.

Bon, la liste des chansons est courte, je vous la recopie :

– I.
– II.
– III.
– IV.
– V.

Voilà, c’est tout. Oui, apparemment, ça les faisait chier ces Mexicains de trouver un titre à leurs pistes. Ils ont déjà été bien gentil de trouver un titre à l’album, alors que visiblement, vu l’effort fait sur le livret, ils s’en contrefoutaient, donc ne venez pas les faire caguer avec les titres des chansons !

Oui, Mexicains. Le nom Guapo me fait penser à des Mexicains. Ça a une consonance assez proche de guano, ce qui n’est pas un compliment. Bon, on ne va pas pour autant décréter immédiatement que ce groupe, c’est de la merde, écoutons d’abord l’album !

http://youtu.be/g0BvkeASZDQ

Guapo – Black Oni II

Bon, soyons francs, à la première écoute, j’étais sans doute dans le même état que vous. Hébété. Interloqué. Anxiété. Sentiment d’insécurité. Souffle court. Mains moites. Pieds poites. Est-ce de la musique ? Se moque-t-on de moi ? Ai-je été audioviolé ?

Cependant, en bon journaliste consciencieux – et en souvenir de mes bons moments passés en prison –, j’ai réécouté l’album une seconde fois. J’ai eu les mêmes sentiments. Je l’ai réécouté une troisième fois, puis encore une autre, et encore plusieurs autres. Et à la fin, j’y ai pris du plaisir.

Alors, comment décrire cette musique ? On la qualifiera de post-rock expérimental. C’est-à-dire qu’elle utilise des instruments habituels, mais joués de façon inhabituelle. Une guitare, un synthétiseur, une batterie, mais chacun ramenés à leur plus simple expression. La musique est décomposée en phrases très simples, répétées, inlassablement. Le tout dans une ambiance  sombre, très industrielle, très futuriste. C’est un peu comme si Guapo avait composé aujourd’hui la musique d’un film rejouant les Temps modernes dans les décors de Metropolis. Ce cd rappelle immanquablement les musiques qu’on a habituellement dans les jeux vidéos pour accompagner le passage où on se trouve dans un royaume futuriste technologique peuplé de méchants. Ça m’a rappelé aussi tous les films japonais se déroulant dans un futur industriel, avec les méchas et tout.

Soyons franc, il faut quand même pour l’apprécier apprécier un peu le rock qui se joue fort et la musique expérimentale, dans la veine de Philip Glass ou de Charles Ives.

Les Anglais Daniel O’SullivanMatt Thompson et Dave Smith proposent ainsi un album très cohérent, dont les cinq pistes sont autant d’expérimentations autour de la musique. Ils avancent leurs morceau de manière scientifique, essayant chaque phrase mélodique plusieurs fois avant de choisir de la laisser ou de la réincorporer plus tard, comme un enfant qui examinerait chaque jouet avec attention avant de le conserver ou le jeter. Ils font preuve d’une grande recherche et d’un fastidieux travail, ce n’est pas juste du bruit. Mais ça sera considéré ainsi par beaucoup. Dans tous les cas, attention, ce n’est pas conventionnel. Attention également, rechercher des photos du groupe sur un moteur de recherche bien connu peut mener à trouver des photos d’hommes en slip. Vous aurez été prévenus.

4 commentaires

  1. Je plussoie, pour de l’expérimental, c’est parfaitement audible. Ça me fait un peu penser à du Pierre Henry mâtiné de Mister Bungle, pour le son du synthé et les mesures décalées. Si à l’écoute, l’extrait manque d’un petit revenez-y à mon goût, je ne peux qu’être admirative devant tant d’audace dans le choix des titres.

    Et puis, vivent les tambours musicaux. Pis même les boîtes de vitesses musicales. Na.
    https://www.youtube.com/watch?v=Qct3nBWlNTA

    (Note aux audacieux qui voudraient voir des hommes en slip : je tiens à souligner le fait que cette recherche peut choquer les âmes les plus sensibles. En effet, parmi les résultats de Google Images se trouve un cliché de Robert Pattinson.)

  2. Avec l’accroche « bruit », je m’attendais à quelque chose d’un peu plus inaudible. Dans le genre, The Knife a été aussi dans ce même genre de démarche récemment, en touchant au bruit (soft), justement, avec des morceaux comme Fracking Fluid Injection.

    Par contre, ce que je n’ai pas compris, c’est que tu connais donc la façon de dire « merde de chauve-souris » en quechua, et tu ne te poses toujours pas de question sur ta santé mentale ?

Laisser un commentaire